Au cœur de la quatrième révolution industrielle, l'intelligence artificielle est perçue comme un vecteur de transformation majeur et sans précédent. Cependant, elle soulève également des questions importantes quant à son influence sur la répartition des emplois, ainsi que sur les stéréotypes et préjugés intégrés. Les femmes, souvent au premier rang des transformations, subissent directement ces conséquences, ce qui accentue la nécessité d'une réflexion approfondie et d'actions ciblées pour assurer une transition numérique juste et équilibrée.
En mars 2023, un rapport publié par Goldman Sachs annonçait un chiffre spectaculaire : 300 millions d’emplois seraient menacés par l’IA générative. Une estimation qui dépasse toutes celles réalisées ces dernières années et qui s’explique par une accélération du déploiement de l’IA en 2023. L’Organisation Mondiale du Travail a dessiné dans une étude publiée en août 2023, un tableau plus nuancé. Les emplois détruits seraient répartis différemment selon les pays. Les pays riches, en raison de leur contexte économique et de leur avancement technologique, seraient davantage concernés par la destruction d’emplois. 5,5% des emplois dans les pays à revenu élevé seraient exposés aux effets de l’automatisation de la technologie. Dans les pays à faible revenu, le risque d’automatisation ne concernerait que 0,4% de l’emploi.
En Europe et aux États-Unis, où les métiers du tertiaire se développent majoritairement depuis plusieurs décennies, deux tiers des emplois seraient exposés “à un certain degré d’automatisation par l’IA”. De son côté, McKinsey estime qu’environ 30% des heures de travail effectuées aux État-Unis pourraient être automatisées (et donc disparaître) d’ici la fin de la décennie. Une réalité qui prend chair alors qu’une société comme IBM a annoncé geler ses embauches et espérer automatiser d’ici 5 ans, 8 000 emplois actuellement dédiés au support client.
Le rapport de McKinsey met également en évidence une autre réalité : la vulnérabilité des femmes face à ce phénomène. Huit femmes sur dix aux États-Unis occupent des emplois exposés de manière significative à l'automatisation par les IA, contre six hommes sur dix. En effet, les emplois les plus impactés par l’arrivée de l’intelligence artificielle sont, historiquement, ceux occupés par des femmes.
Par exemple, 70% des employés qui travaillent dans l’assistance et le soutien à l'administration au sein des entreprises sont, aujourd'hui, des employées. Cela inclut par exemple, la comptabilité, le recouvrement, le secrétariat de direction, l’assistance commerciale mais aussi l’interprétation ou la traduction… De même pour les métiers des secteurs de la santé et de l'éducation (enseignantes, bibliothécaires…)
Dans son rapport, l’Organisation Mondial du Travail corrobore cette analyse. Les femmes occupant en plus grande part des emplois de bureau dans les pays riches (contrairement aux pays à faible revenu), ce sont leurs emplois qui connaîtront les bouleversements les plus importants.
Outre les conséquences sur l'emploi, l'IA amplifie également les stéréotypes préexistants dans la société. DALL.E ou Midjourney, IA capables de produire des images à partir de descriptions textuelles, sont souvent responsables de la perpétuation de stéréotypes préjudiciables aux femmes.
Virginie Mathivet, fondatrice de Hemelopse, s’est prêtée à l'exercice. En demandant à une IA de représenter “une femme de 50 ans”, les images générées présentaient toujours les caractéristiques stéréotypées : un carré blond clair ou blanc, un tee-shirt ample de couleur pastel et un sourire discret. Ces représentations simplistes et homogènes ne rendent pas compte de la diversité réelle des femmes de cet âge.
© "Femme de 50 ans" - Dall.E
Autre exemple, lorsque l'on demande à une IA générative de représenter un CEO, elle génère systématiquement des images d'hommes blancs d'environ 40 ans. De même, pour des images de secrétaires, les IA fournissent invariablement des femmes.
Les IA ne créent pas les stéréotypes, mais les amplifient en reproduisant les schémas existants dans la société. Les modèles sont en effet, alimentés par les images issues de banques d’images (Getty, Flickr, Shutterstock…), ce qui conduit à une reproduction des représentations archétypales et traditionnelles.
Face à ces défis, plusieurs initiatives se mettent en place pour attaquer le problème à différents niveaux :
C’est le cas du Pacte pour une intelligence artificielle égalitaire menée par le laboratoire de l'Égalité qui propose :
Le Réseau des femmes pour une IA éthique de l'UNESCO part du constat que seuls 20 % des employés occupant des fonctions techniques dans les entreprises d'apprentissage automatique, 12 % des chercheurs en intelligence artificielle au niveau mondial et 6 % des développeurs de logiciels professionnels sont des femmes. Le réseau vise donc à renforcer la participation des femmes en promouvant la collaboration, le partage des connaissances et l'échange d'expériences.
Il offre également une plateforme pour discuter des enjeux de genre dans l'IA et pour influencer les politiques et les pratiques dans ce domaine. Enfin, événements, ateliers, conférences favorisent le réseautage et la formation des femmes dans le domaine de l'IA.
En plus de ces initiatives, WomeninAI est une organisation internationale qui s'engage à augmenter la représentation des femmes dans tous les domaines liés à l'IA. Elle offre des opportunités de formation, de mentorat et de réseautage pour les femmes intéressées par les carrières en IA. L'organisation travaille également à sensibiliser les entreprises et les décideurs aux enjeux de genre dans l'IA et à promouvoir des politiques d'embauche plus inclusives.
Ces initiatives concrètes jouent un rôle essentiel dans la promotion de l'égalité dans le domaine de l'IA afin de créer un écosystème plus égalitaire.
Le développement de l’intelligence artificielle n’a pas fini d’évoluer et les compétences techniques à acquérir aussi. Alors, si vous souhaitez développer les solutions innovantes de demain, venez vous former aux métiers de la Data et de l'IA !